UN PATAQUÈS DANS NOS TÊTES

On pourrait penser que ce que nous venons de traverser ressemble, à quelque chose près, au BIG BANG — ou alors la disparition des dinosaures — non ! —, bon — tout au moins au sentiment de la disparition de ces créatures. Non ! —, bon — alors d’une manière plus métaphorique : aux trous noirs. Voilà ! Ce trou noir dans l’univers qui attire et dévore tout sur son passage, comme un aspirateur, tellement puissant qu’il aspire même la lumière et même d’autres trous noirs pour être encore plus grand. C’est cette sorte de fuite SANS FIN que subit notre planète depuis sa création.
Et nous avec ! — Tout ça c’est OUF OUF.
Comment est-ce possible ? D’où ça vient ? C’est quoi tout ça ?
Univers - Big Bang - Dinosaures - Trou noir - Nous.
Et on se met à gamberger que nos vies sont aussi faites de trous ; cabossées, vidées, déchirées, usées ! Et en arrière-plan comme une litanie ; la petite musique de Serge.
♪ Des p’tits trous, des p’tits trous, toujours des p’tits trous. ♪
Y a-t-il une autre issue ; une sortie comme celle du trou noir qui rejetterait tout ce qu’il a avalé, absorbé ? Pour répondre à ces questions il nous faudrait une tête pensante, ou pour être dans l’air du temps un scientifique — mais la crème des crèmes — au moins du EINSTEIN — ben voyons !
Qu’à cela ne tienne ! EINSTEIN en personne. On te convoque sur la scène, avec un décor super trop réaliste compensé par un scénario de science-fiction — un doc fiction — du contemporain quoi !

Lumière sur le plateau — On découvre sa silhouette sur scène — Face à nous derrière le bureau présidentiel. EINSTEIN debout et au-dessus de sa tête le fameux tableau du joli village de France. Ce soir, il n’a pas la tête en pétard, cette fois-ci cheveux bien coiffés, comme gominés — Il s’apprête à prendre la parole avec un ton solennel. L’heure est grave — Un temps de réflexion, tire sa célèbre langue, il attaque de but en blanc.

« Bien sûr que rien ni personne ne peut voyager plus vite que la lumière. Mais ici. OUI. On a la chance, la possibilité, de faire ce Voyage dans le temps, sans chiffres ni algorithmes ; quelques mots — parfois beaucoup, je le concède — pour enfin entrer dans une autre dimension et méditer sur la relativité, mais restreinte, intime et soyons fous ; une relativité universelle. »

À nouveau un bref instant de réflexion ; à peine ; reprend son souffle — Devant lui un poste radio — Tout petit poste radio — Tire à nouveau sa langue et appuie sur l’indispensable bouton “play” — Du poste sort une musique, un chant, celui de Ferré ; Léo de son prénom :
♪ Avec le temps,
avec le temps, va, tout s’en va… ♪

«Écoutez, dit-il, entendez Léo.
Cette satanée histoire du temps. La grande théorie que j’ai, avec acharnement, expérimentée durant toute ma vie.
 »

Nouvelle respiration… Voix de Ferré… Et on oublie la voix — EINSTEIN baragouine dans sa bouche quelques mots retenus de la chanson. Pas beaucoup. Après une grande respiration ; baisse le son et reprend.

« C’est ce qui fait que tout instant présent, dès qu’il apparaît, est remplacé par un autre instant présent. Le temps est ce qui garantit la présence du présent en permanence. Un présent renouvelé, mais toujours présent. Espace de temps, pendant lequel a lieu un événement, une action, un état qui mélange émotions et sentiments avec tous nos sens et pas qu’un ; les cinq sens en perpétuel éveil. »

Nouvelle respiration — Tire à nouveau la langue.

« Telle est la force du Théâtre.
J’ai demandé à l’académie scientifique ; à l’ensemble de mes compères, de se pencher sur cette question. Il est important de basculer dans une autre dimension faire avec un geste fort. J’ai cette volonté.
 »

Dernière respiration — Ultime tirage de langue - toute rouge - un geste personnel pour participer à ce rituel artistique.

« Il est temps d’inscrire le Théâtre, comme la science, comme les trous noirs, comme l’Univers comme l’humain, au patrimoine mondial — C’est ESSENTIEL ! »

La radio discrètement entame la chanson de Stone et Charden :
♪ Vive la France et les joueurs d’accordéon,
vive les bals et les flonflons… ♪

-Haïm Menahem